Gil Def Mer 22 Mar - 18:53
PLAIDOYER DES GRANDES CAUSES
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Enseignements de liberté Gil DEF - N° 632 / 19.04.2009
On m’avait écrit liberté pour mes cahiers pour cent mille ans Alors je lui ai donnée l’âge inouï des beautés sauvages Dix ans, collier et coquillage à en préparer des voyages Mais je n’avais pas intégré les perceptions vraies de mon temps
Ceux qu’on croit grands n’ont-ils pas tort de tant léguer cet idéal La lune au téléobjectif, car les pièges pour les oiseaux Les étrennes du laid, du faux, les arènes pour les taureaux Le sang chaud, les mises à mort, tant de découvertes brutales
On m’avait promis liberté partout, sur les lieux d’embarquement Alors je lui ai donnée l’âge impatient de partir au large Vingt ans, entier, et l’avantage à reprendre tous les sillages Mais je n’avais pas supposé les caps dispersés tant et tant
Ceux qu’on croit grands n’ont-ils pas tort de tant larguer cet idéal Tout ça pour des spectres captifs, plaintifs du manque d’indigo De liens avec l’invisible, tout ça pour un vieux lamento Un bateau à sec, échoué, ce rien de nous au terminal
On m’avait chanté liberté de voix fortes des résistants Alors je lui ai donnée l’âge en paix qui repeint les visages Mon temps, les blés, le courage, les voies et les vols de passage Mais je n’avais pas escompté trop de désertions dans les rangs
Ceux qu’on croit grands n’ont-ils pas tort de tant noyer cet idéal Tout ça pour vivre fautifs, au passif devant les tableaux Icare tombé de si haut, ou Guernica de Picasso A en délaisser tout effort, tout du sursaut paradoxal
On m’avait rendu liberté plus que naguère noir et blanc Alors je lui ai donnée l’âge en baisers rouge essai sur les plages Mon temps, du son et de l’image nouvelle vague et tout qu’on partage Mais je n’avais pas encore vu les cinémas des gouvernants
Ceux qu’on croit grands n’ont-ils pas tort de tant sabrer cet idéal Tout ça pour jouer facile, fossile des idées en trop Des messages sur la peau, des mots ricochets, des échos Et se faire aux grands désaccords, à mourir d’aimer immoral
Je me suis changé liberté comme défi décidément Alors je lui ai donnée l’âge à nouveau enfant tourne-page Ce temps futur, plus mature que trente glorieuses d’outrages Ce tous ensemble, hisse et ho, et contre tout empêchement
Ceux qu’on croit grands n’ont-ils pas tort de tant tuer cet idéal Tout ça pour un credo habile, hostile au dire des droits égaux A l’art intrépide du saut avant l’être et l’avoir plus haut Plus loin, plus beau, cent fois encore à désir tant fondamental
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La poésie, c'est les paroles éparses du réel (Octavio Paz)