Le souvenir des morts - Anna de Noailles
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Le souvenir des morts - Anna de Noailles
LA MORT ET LE DEUIL |
Le souvenir des morts "Les Vivants et les Morts" - 1913 Anna de Noailles Des nuages, du froid, de la pluie et du vent Le printemps est sorti sur toute la nature ; Les arbres ont repris leur verdoyante enflure, Et semblent protéger les rapides vivants. Ils vont, ces affranchis, à qui la Destinée Accorde encor un jour de délice ou de paix, Et leur aveuglement candide se repaît De ce sursis de vie, humble et momentanée. Ainsi vont les humains tolérés par le Temps ! — Tel un chaînon léger à la chaîne des âges, Il tinte clair et frais, le vaniteux printemps, Et comme un vif grelot excite leur courage ! Mais je ne louerai pas le hardi renouveau : Le printemps vient des morts, et je le leur dédie. Tout est vaine, bruyante ou morne comédie, Puisque tout est détresse accédant au repos. — Multitude endormie en la cité des pierres Ils ont l’éternité que nous n’obtenons pas, L’espace est concentré sous leur faible paupière, L’obsédant mouvement s’arrête sous leurs pas. Alignés côte à côte, austère compagnie, Ils sont des étrangers, que seul dérangera Le convive nouveau, en funèbre apparat, Qu’on descend au séjour de la monotonie. En vain les yeux vivants, penchés sur leur néant, Tentent de réveiller ces puissantes paresses, Et d’absorber les corps à force de caresses Ainsi que le soleil aspire l’océan ! Anéantis, fermés et froids comme les astres, Ils restent. Ni les voix, ni le chant des clairons, Ni le sublime amour flamboyant n’interrompt Le silence infini de leur calme désastre. Ah ! les rires, l’espoir, les projets, les étés Sont d’incertains signaux à qui mon cœur résiste ; La vie est sans aspects puisque la mort existe. Je vous salue, ô Morts ! Constance, Fixité ! — On bâtit : des maçons debout sur les tranchées Font vibrer dans l’azur le bruit vaillant du fer, Mais mes yeux vont, emplis d’un songe âpre et désert, De nos maisons debout à vos maisons couchées. Je laisse les oiseaux, dans le laiteux azur, Acclamer la saison insinuante et tendre ; Je pense aux froids jardins enfermés dans les murs Où les morts patients rêvent à nous attendre. Je m’éloigne de tout ce qui vit et qui sert ; Je pense à vous : mon but, mes frères, mon exemple. La Mort vous a groupés dans son grave concert, Et sa sombre unité, nous la chantons ensemble !… Autres textes du même auteur Annecy Après l'ondée Automne, ton soleil Bayonne Ce ne sont pas les mots Chaleur Comme le temps est court Constantinople Eloge de la rose Entre les tombeaux et les astres Exaltation Eveil d'une journée Il fera longtemps clair ce soir Il pleut. Le ciel est noir J'écris pour que le jour où je ne serai plus J'espère de mourir Je croyais être Je veux bien respirer… Jeunesse Joviale odeur de la neige L'abondance L'ardeur L'automne L'enchantement de la Sicile L'enfance L'hiver L'Ile des folles à Venise L'innocence L'inquiet désir L'Inspiration L'offrande à la nature La cité natale La jeunesse La journée heureuse La mort de Jaurès La mort dit à l'homme La mort fervente La musique de Chopin La naissance du jour La vie profonde Le baiser Le cri des hirondelles Le jardin et la maison Le pays Le plaisir des oiseaux Le port de Palerme Le soldat Le temps de vivre Le verger Le voyage Le voyage sentimental Les biches Les bords de la Marne Les îles bienheureuses Les journées romaines Les morts Les morts pour la Patrie Les nuits d'été Les plaisirs des jardins Les poètes romantiques Les voyages Matin frémissant Mon âme de peine et de joie Novembre O lumineux matin Ô Mort, vous rendez tout… Paysage du Hainaut Prière au destin Prière du combattant Qu'ai-je à faire de vous ? S'il est quelque autre chose au monde Stances à Victor Hugo Trains en été Tristesse de l'amour Un automne à Venise Un jardin au printemps Un soir à Vérone Un soir en Flandre Verdun Versailles Visite à la cathédrale de Reims |
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