Que de cendres dans mon crâne - Tahar Ben Jelloun
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Que de cendres dans mon crâne - Tahar Ben Jelloun
ETATS ET DISPOSITIONS DE L'ESPRIT |
Que de cendres dans mon crâne "Le Discours du chameau" - 1974 Tahar Ben Jelloun Que de cendres dans mon crâne qui croit encore le rêve possible que de sang sous cette terre grise que d’oliviers qui meurent à l’aube figée que de poèmes muselés dans la mort blanche Laissez-moi me rouler dans les sables pour perdre la mémoire pour ne plus parler des hommes pour ne plus fuir la mort Les "frères" les fossoyeurs, les larmes aux yeux, massacrent les camarades on nettoie la capitale et on se lave le sexe on préside la prière et on oublie Après tout pourquoi le dire je ne me lamente pas il en meurt tous les jours dans les champs dans les sables l’olivier et le soleil le savent je parle plutôt pour la terre meurtrie je parle pour que le ciel m’ouvre une porte sur le bleu et le vert je parle pour que l’océan soit seul témoin de notre blessure je parle pour que les enfants puissent voir un jour l’aube naître de leurs rêves je parle pour qu’on sache que l’histoire a été truquée je parle mais que vaut la parole d’un chameau ? je parle pour le désert mais le sable se colore déjà de ma solitude le désert avance vers Amman la pitié la tempête étranglent les âmes dégénérées surprises dans leur nudité hideuse Je parle et mon discours se perd dans les dunes peut-être qu’on m’entend Mon prochain est loin il croît à peine à la fatalité tel l’oiseau qui a peur se pose sur la branche incertaine mon prochain est un camarade qui a surpris mon délire et pardonne ma folie il a quitté la tente Mon chant est indigne de ceux qui meurent la nuit et renaissent avec l’aube mon chant est pauvre je ne suis qu’un chameau un destin qui s’achève je suis triste mais pas désespéré même si les « frères » et les autres ont décidé que mes camarades seront les oubliés de l’histoire ils ne savent pas ce que le désert va enfanter Un rêve est jeté dans l’espace un rêve qui a raison une étoile audacieuse éclaire ce rêve dans le combat dans l’amour dans les retrouvailles de l’arbre et de la forêt dans la vie qui fane les couronnes ce rêve sans mots éclate dans les rues arabes chante et appelle la mort détachée du ciel L’homme à la mémoire fanée monte sur le dos d’un vieil esclave et fait un discours pour retenir le rêve éclaté il perd ses mots bave se décompose Autres textes du même auteur : |
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La poésie, c'est les paroles éparses du réel (Octavio Paz)
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