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Les amours de porcelaine Gil DEF - N° 833 / 25.03.2016
Quand les amours se reconnaissent, il est plutôt improbable D’y poser des mots, de percer leurs mystères en tourbillon Il est plutôt rare qu’on leur accorde un droit à la déraison Pourtant, la conjugaison d’aimer, c’est à l’invraisemblable
Tout a été dit des amours, mais je ne dirai pas, c’est trop Je ne veux rien oublier de mes instances amoureuses De celles qui m’ont fait la grâce d’y être les charmeuses Du temps, des espaces, du sentimental à fleur de peau
Quand les amours se reconnaissent, elles sont de porcelaine Tremble le premier pas de se retrouver d’un coup sujet A tant de maladresses, à tant d’accidents, de forfaits Quand bien même la sincérité de l’aveu que l’on aime
Porcelaine précieuse et fragile, l’amour l’est d’autant Ce passage de l’un à l’autre au besoin des accordances Même pensées, mêmes gestes, mêmes vibrantes présences De l’esprit et du corps pour s’apprivoiser au mieux le temps
La porcelaine, combien d’actes précis en cette matière, Mais d’un rien, elle se brise, et d’en ramasser les morceaux C’est peine perdue, ainsi sont les amours, in extenso Bonheur et malheur d’aimer, la loi des grâces éphémères
Quand les amours se reconnaissent, un et un qui font deux De même façon à trembler et à compter l’un pour l’autre En toutes circonstances, mais combien d’erreurs, de fautes De méprises aussi pour se maudire d’être amoureux
L’amour est toujours à l’âge des apprentis de mille choses Sans logique, sans certitude de savoir les besoins, Les désirs, de l’un, de l’autre, tant tout peut changer d’un rien Tant l’on peut aimer des rêves et s’absenter de sa cause
Quand bien même ce que l’on sait, et le bien que l’on fait Au nom de l’amour, demeurent les questions incontournables De chance et de malchance, des accidents inséparables De la vie, et bien plus encore en tout attachement parfait
Combien d’amours à l’obligation de perdre leurs adresses L’un part, l’autre reste, c’est une histoire brisée à mille regrets Si dérisoires, c’est un accident, et rien d’un procès Contre le sort n’empêchera les fleurs coupées de tristesse
L’un part, l’autre reste, et l’amour en vagues, si loin, si là Si là et si loin, l’amour qui résiste et l’amour qui s’affale Mais le mal n’est pas le même, de s’éloigner d’une étoile Ou de l’éteindre à jamais même si on la garde en soi
Il est des amours à ne pas juger, amours impossibles Amours brèves, amours qui ne veulent pas se refermer Sur la conclusion amère des amours inachevées Amours de trêve qui ne veulent pas des adieux pénibles
Il n’y a pas de long et délicieux voyage en amour Sans un jour fatidique qui l’arrête, l’un part, l’autre reste Mais vivre entièrement, c’est aimer toujours et on l’atteste Tant à rire qu’à pleurer jusqu’au seuil de son dernier jour
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