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A l'heure où l'orient - Charles Guérin

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A l'heure où l'orient - Charles Guérin Empty A l'heure où l'orient - Charles Guérin

Message  Gil Def Mer 14 Avr - 18:29

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L'HOMME ET LA MER

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A l'heure où l'orient ...
"Le Seneur de cendres" - 1898
Charles Guérin


A l'heure où l'orient - Charles Guérin A_l_he10


A l’heure où l’orient d’étoiles se diapre,
J’allais sur les rochers qui dominent la mer,
Seul et riant d’orgueil sous l’assaut du vent âpre,
Goûter une orageuse ivresse de la chair.

Le ressac lourd tonnait au bas du promontoire.
Je mesurais l’ampleur des cieux occidentaux
D’où le soleil déchu trahit encor sa gloire
Par un rayon de feu qui traîne sur les eaux.

Et debout contre un roc ruisselant du calvaire
Que les flots éternels goutte à goutte ont sculpté,
Comme une croix au bord du gouffre solitaire,
J’égalais par mes bras ouverts l’immensité.

Mon cœur gonflé battait avec le cœur du monde,
Mes veines charriaient le sel de l’Océan,
Et je sentais germer en moi, clarté féconde,
Les astres que la nuit agite dans son van.

J’aurais voulu rugir plus haut que la marée,
Me dissiper dans l’air sonore avec l’embrun,
Et sans mourir atteindre à l’extase sacrée
Où l’âme anéantie et Dieu ne font plus qu’un.

Mais le déclin des flots découvrait le rivage ;
Dans les antres du roc la mer ne grondait plus ;
Et le bruit de mon sang, désormais moins sauvage,
S’accordait aux rumeurs songeuses du reflux.

La nuit montait avec sa suite d’heures graves ;
Sa robe caressait le sable bruissant.
Et, secouant alors ses charnelles entraves,
Elancé vers l’azur d’un coup d’aile puissant,

Mon esprit t’embrassait d’une plus vaste étreinte,
O mer dont les sillons ne portent pas d’épis,
Mais qui d’un pôle à l’autre enflant ta large plainte,
Roules avarement des perles dans tes plis !

Je comparais aux fruits que forme la pensée
Ces trésors qu’en secret tu mûris loin du jour,
Et ton âme stérile en fureurs dépensée
Au cœur qui retentit des sanglots de l’amour.

Et ma pitié tombait sur toi, matière obscure
Qui ne sauras jamais ta force et ta beauté,
Et qui bouges sans fin avec un long murmure
Tes flancs voluptueux qui n’ont point enfanté.

Je vous bénis, moments de force où le poète,
Plongeant comme une cime en plein ciel et devant
L’horizon sans rivage et la mer inquiète,
Proclame son orgueil aux quatre aires du vent !

Soirs purs où, délivré du vain bruit de la terre,
Cet homme qui cachait son rêve par pudeur,
Se trouvant seul avec la solitude austère,
Mesure enfin son âme et connaît sa grandeur !








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La poésie, c'est les paroles éparses du réel (Octavio Paz)
Gil Def
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