Au Christ - Marceline Desbordes-Valmore
Page 1 sur 1
Au Christ - Marceline Desbordes-Valmore
ETATS ET DISPOSITIONS DE L'ESPRIT CROYANCES OU CONVICTIONS |
Au Christ "Poésies" - 1830 Marceline Desbordes-Valmore Récitante : Anne Benoït Que je vous crains ! Que je vous aime ! Que mon coeur est triste et navré ! Seigneur ! Suis-je un peu de vous-même tombé de votre diadême, ou suis-je un pauvre ange égaré ? Seigneur ! Parlez-moi, je vous prie ! Je suis seule sans votre voix. Oiseau sans ailes, sans patrie, sur la terre dure et flétrie je marche et je tombe à la fois ! Fleur d'orage et de pleurs mouillée exhalant sa mourante odeur, au pied de la croix effeuillée seigneur, ma vie agenouillée veut monter à votre grandeur ! Voyez ! Je suis comme une feuille qui roule et tourbillonne au vent, un rêve las qui se recueille, un lin desséché que l'on cueille et que l'on déchire souvent. Sans savoir, l'indolence extrême, si l' on a marché sur mon coeur, brisé par une main qu'on aime, seigneur ! Un cheveu de nous-même, est si vivant à la douleur ! Au chemin déjà solitaire où deux êtres unis marchaient, les voilà séparés... mystère ! On a jeté bien de la terre entre deux coeurs qui se cherchaient. Ils ne savent plus se comprendre. Qu'ils parlent haut, qu'ils parlent bas, l'écho de leur voix n'est plus tendre : seigneur ! On sait donc mieux s'entendre alors qu'on ne se parle pas ? L'un, dans les sillons de la plaine, suit son veuvage douloureux ; l'autre, de toute son haleine, de son jour, de son aile pleine, monte ! Monte ! Et se croit heureux ! Voyez ! à deux pas de ma vie, sa vie est étrangère à moi, pauvre ombre qu' il a tant suivie, tant aimée et tant asservie ! Qui mis tant de foi dans sa foi ! Moi, sous l'austère mélodie dont vous m' envoyez la rumeur, mon âme soupire agrandie, mon corps se fond en maladie et mon souffle altéré se meurt. Comme l'enfant qu'un rien ramène, l'enfant dont le coeur est à jour, faites-moi plier sous ma chaîne, et désapprenez-moi la haine, plus triste encore que l'amour ! Une fois dans la nuit profonde j'ai vu passer votre lueur : comme alors, enfermée au monde, pour parler à qui me réponde laissez-moi vous voir dans mon coeur ! Rendez-moi, Jésus que j'adore, un songe où je m'abandonnais ! Dans nos champs que la faim dévore, j'expiais... j'attendais encore ; mais, j' étais riche et je donnais. Je donnais et, surprise sainte, on ne raillait plus ma pitié ; des bras du pauvre j'étais ceinte, et l' on ne mêlait plus l'absinthe aux larmes de mon amitié ! ... |
_________________
La poésie, c'est les paroles éparses du réel (Octavio Paz)
Gil Def- Admin
-
Nombre de messages : 5856
Age : 74
Localisation : Nord de la France
Date d'inscription : 16/11/2007
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum