Couchant d'hiver - Jules Laforgue
COUPS DE COEUR POETIQUES :: POEMES EN EXPOSITION SUR UN THEME :: LA NATURE : LES PHENOMENES NATURELS
Page 1 sur 1
Couchant d'hiver - Jules Laforgue
L'HOMME ET LA NATURE AU FIL DES SAISONS |
Couchant d'hiver "Le Sanglot de la terre" - 1880 Jules Laforgue Quel couchant douloureux nous avons eu ce soir ! Dans les arbres pleurait un vent de désespoir, Abattant du bois mort dans les feuilles rouillées. À travers le lacis des branches dépouillées Dont l’eau-forte sabrait le ciel bleu-clair et froid, Solitaire et navrant, descendait l’astre-roi. Ô Soleil ! l’autre été, magnifique en ta gloire, Tu sombrais, radieux comme un grand Saint-Ciboire, Incendiant l’azur ! À présent, nous voyons Un disque safrané, malade, sans rayons, Qui meurt à l’horizon balayé de cinabre, Tout seul, dans un décor poitrinaire et macabre, Colorant faiblement les nuages frileux En blanc morne et livide, en verdâtre fielleux, Vieil or, rose-fané, gris de plomb, lilas pâle. Oh ! c’est fini, fini ! longuement le vent râle, Tout est jaune et poussif ; les jours sont révolus, La Terre a fait son temps ; ses reins n’en peuvent plus. Et ses pauvres enfants, grêles, chauves et blêmes D’avoir trop médité les éternels problèmes, Grelottants et voûtés sous le poids des foulards Au gaz jaune et mourant des brumeux boulevards, D’un œil vide et muet contemplent leurs absinthes, Riant amèrement, quand des femmes enceintes Défilent, étalant leurs ventres et leurs seins, Dans l’orgueil bestial des esclaves divins… Ouragans inconnus des débâcles finales, Accourez ! déchaînez vos trombes de rafales ! Prenez ce globe immonde et poussif ! balayez Sa lèpre de cités et ses fils ennuyés ! Et jetez ses débris sans nom au noir immense ! Et qu’on ne sache rien dans la grande innocence Des soleils éternels, des étoiles d’amour, De ce Cerveau pourri qui fut la Terre, un jour. Autres textes du même auteur A une tête de mort Arabesques de malheur Certes, ce siècle est grand Complainte de l'automne monotone Complainte de l'oubli des morts Complainte du pauvre corps humain Complainte du pauvre jeune homme Complainte du roi de Thulé Dans la rue Devant la grande rosace en vitrail de Notre-Dame Esthétique L'Impossible La cigarette Le brave, brave automne Le vaisseau fantôme Les têtes de morts Médiocrité Méditation grisâtre Noël sceptique On les voit chaque jour Soir de carnaval Triste, triste Veillée d'avril |
_________________
La poésie, c'est les paroles éparses du réel (Octavio Paz)
Gil Def- Admin
-
Nombre de messages : 6736
Age : 75
Localisation : Nord de la France
Date d'inscription : 16/11/2007
COUPS DE COEUR POETIQUES :: POEMES EN EXPOSITION SUR UN THEME :: LA NATURE : LES PHENOMENES NATURELS
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
|
|