La panthère noire - Charles Marie Leconte de Lisle
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La panthère noire - Charles Marie Leconte de Lisle
L'HOMME ET LA NATURE LE MONDE ANIMAL |
La panthère noire "Poèmes barbares" - 1862 Charles Marie Leconte de Lisle Une rose lueur s’épand par les nuées ; L’horizon se dentelle, à l’Est, d’un vif éclair ; Et le collier nocturne, en perles dénouées, S’égrène et tombe dans la mer. Toute une part du ciel se vêt de molles flammes Qu’il agrafe à son faîte étincelant et bleu. Un pan traîne et rougit l’émeraude des lames D’une pluie aux gouttes de feu. Des bambous éveillés où le vent bat des ailes, Des letchis au fruit pourpre et des cannelliers Pétille la rosée en gerbes d’étincelles, Montent des bruits frais, par milliers. Et des monts et des bois, des fleurs, des hautes mousses, Dans l’air tiède et subtil, brusquement dilaté, S’épanouit un flot d’odeurs fortes et douces, Plein de fièvre et de volupté. Par les sentiers perdus au creux des forêts vierges Où l’herbe épaisse fume au soleil du matin ; Le long des cours d’eau vive encaissés dans leurs berges, Sous de verts arceaux de rotin ; La reine de Java, la noire chasseresse, Avec l’aube, revient au gîte où ses petits Parmi les os luisants miaulent de détresse, Les uns sous les autres blottis. Inquiète, les yeux aigus comme des flèches, Elle ondule, épiant l’ombre des rameaux lourds. Quelques taches de sang, éparses, toutes fraîches, Mouillent sa robe de velours. Elle traîne après elle un reste de sa chasse, Un quartier du beau cerf qu’elle a mangé la nuit ; Et sur la mousse en fleur une effroyable trace Rouge, et chaude encore, la suit. Autour, les papillons et les fauves abeilles Effleurent à l’envi son dos souple du vol ; Les feuillages joyeux, de leurs mille corbeilles ; Sur ses pas parfument le sol. Le python, du milieu d’un cactus écarlate, Déroule son écaille, et, curieux témoin, Par-dessus les buissons dressant sa tête plate, La regarde passer de loin. Sous la haute fougère elle glisse en silence, Parmi les troncs moussus s’enfonce et disparaît. Les bruits cessent, l’air brûle, et la lumière immense Endort le ciel et la forêt. Autres textes du même auteur A George Sand A un poète mort A Victor Hugo Aux Modernes Aux morts Effet de lune L'albatros L'incantation du loup La chasse de l'aigle La forêt vierge Le coeur de Hialmar Le désert Le jaguar Le Nazaréen Le sacre de Paris Le soir d'une bataille Le Sommeil du vautour Les éléphants Les roses d'Ispahan Les taureaux Un coucher de soleil |
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La poésie, c'est les paroles éparses du réel (Octavio Paz)
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