Thibaut de Champagne - De touz maus n’est nus plesanz
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Thibaut de Champagne - De touz maus n’est nus plesanz
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De touz maus n’est nus plesanz - De tous les maux nul n’est plaisant
Thibaut de Champagne
De touz maus n’est nus plesanz Fors seulement cil d’amer, Mès cil est douz et poignanz Et deliteus a penser Et tant set biau conforter, Et de granz biens i a tanz Que nus ne s’en doit oster. Fins amis obedianz, Vueil a ma dame encliner. Je ne puis estre dolanz, Quant je oi de li parler ; Tant me plest a remenbrer, Que de touz maus m’est garanz Sa biauté a recorde Amors, quant vous m’avez mis Lïé en vostre prison, Melz ameroie estre ocis Que g’eüsse raençon. Tels maus est bien sanz reson Qui me plest, quant me fet pis, Ne ja n’en qier garison. Quanque il vous est a vis, Dame, me senble reson ; Si m’a vostre amor sorpris Et vostre plesant façon, Et biautez a tel foison Qui resplent en vostre vis Et dès les piez jusqu’en son. Se de vos peüsse avoir, Dame, un pou plus biau senblant, Je ne savroie voloir Querre Dieu merci si grant, Que de joie avroie tant Que tuit autre honme, pour voir, Seroient vers moi dolent Dame, ou touz mes biens atent, Sachiez, quant vous puis veoir, Nus n’a si joieus torment. | De tous les maux nul n’est plaisant Fors seulement celui d’aimer ; Mais celui-ci est doux, poignant, Et délicieux à la pensée, Et sait si bien réconforter, Et de grands biens il contient tant Que nul ne s’en doit délivrer. Aux bons amis obéissant, Je veux ma dame saluer. Je ne puis pas être dolent, Lorsque j’entends d’elle parler ; Tant me plaît me la rappeler Que de tous maux m’est un garant Le souvenir de sa beauté. Amour, lorsque vous m’avez mis Attaché en votre prison, J’aurai mieux aimé être occis Que d’en obtenir la rançon. Pareil mal est bien sans raison, Qui me plaît plus quand me fait pis, Dont jamais ne veux guérir. Tout ce qui vous paraîtrait bon Me semblerait, dame, raison. Car votre amour m’a bien surpris, Et votre plaisante façon, Et les beautés qui à foison Resplendissent en votre visage Et de vos pieds à votre tête. Si de vous je pouvais avoir, Dame, un peu plus beau semblant, Je ne saurais jamais vouloir Mander à Dieu faveur si grand ; Car de la joie j’en aurais tant Que tous autres hommes, pour vrai, Seraient auprès de moi dolents. Dame, à qui tout mon bien append, Sachez que quand je vous puis voir, Aucun n’a si joyeux tourment. Traduction : René Bray, 1960 |
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La poésie, c'est les paroles éparses du réel (Octavio Paz)
Gil Def- Admin
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