Sur un portrait de sainte - Victor Hugo
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Sur un portrait de sainte - Victor Hugo
ETATS ET DISPOSITIONS DE L'ESPRIT CROYANCES OU CONVICTIONS |
Sur un portrait de sainte "Les Quatre vents de l'esprit" - 1881 Victor Hugo C’est toi, dénaturée ! oui, te voilà, c’est toi Qui fis taire ton cœur pour écouter ta foi, Qui, pour gagner ton ciel de larve et de chouette, Foulas ton âme aux pieds, mère sourde-muette, Et qui, lorsque ton fils se couchait en travers De ta porte, pleurant et les deux bras ouverts, Marchas sur ton enfant pour entrer dans le cloître. Quand l’amour décroissait, tu crus sentir Dieu croître ; Ah ! folle ! et te voilà, face d’austérité ! Va, la sainteté froide est fausse sainteté. Croire qu’on plaît au Dieu de lumière et de gloire Parce que d’âme blanche on se fait âme noire, Parce qu’on a d’abord soufflé sur son flambeau, Parce qu’on vient à lui, n’étant plus qu’un tombeau Où ceux qui vous aimaient d’avance ont dû descendre, Et qu’on en est le marbre et qu’ils en sont la cendre ! Ô morne vision ! mauvais songe que font Ceux qui désertent Dieu dans le couvent profond ! Dieu, c’est la raison ; Dieu, c’est l’amour ; Dieu, c’est l’être ; C’est le devoir de vivre après le droit de naître ; C’est l’immense clarté sur l’immense combat. Il a voulu que l’homme aimât, conquît, tombât, Et ne fût pas fantôme et deuil. Le froc de bure Ne donne point à l’homme une bonne courbure ; Devenir ombre, c’est obscurcir le saint lieu ; En s’approchant du spectre, on s’éloigne de Dieu. Pas de cloître ; la vie. Un voile couvre un rêve. Le mérite n’est pas, quand vers Dieu l’on s’élève, De rejeter, ainsi qu’un vêtement quitté, Ses parents, sa patrie et son humanité ; De s’enfuir de son cœur ainsi que d’une fange ; De dire : ― Arrachez-moi, Christ, pour que je sois ange, Mon père, ce lambeau, ma mère, ce haillon ! ― De mettre à la nature effarée un bâillon ; De crier : ― Mes enfants où tout mon sang se mêle, Mon fils dans son berceau, ma fille à la mamelle, Tout cela, c’est la nuit, car Dieu seul est le jour. ― De raturer en soi la famille et l’amour Comme des contre-sens qui vous cachent le texte ; Et de perdre la forme humaine, sous prétexte Qu’on monte et qu’on s’en va dans le firmament bleu. Faisons, tout en fixant notre regard sur Dieu, Tous nos devoirs de fils ou de frère ou de père. Soyons l’être penchant, même quand il espère, Par l’esprit vers le bien, par la chair vers le mal ; Sans quitter le réel, conquérons l’idéal ; Restons homme, en montant vers le sépulcre austère. Il faut aller au ciel en marchant sur la terre. Liens vers les textes de cet auteur |
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La poésie, c'est les paroles éparses du réel (Octavio Paz)
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