Le poète est un monde enfermé dans un homme - Victor Hugo
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Le poète est un monde enfermé dans un homme - Victor Hugo
LES PHARES ET LES PASSERELLES HOMMAGE AUX POETES |
Le poète est un monde enfermé dans un homme "La Légende des Siècles" - 1859 Victor Hugo Un poète est un monde enfermé dans un homme. Plaute en son crâne obscur sentait fourmiller Rome ; Mélésigène, aveugle et voyant souverain Dont la nuit obstinée attristait l’œil serein, Avait en lui Calchas, Hector, Patrocle, Achille ; Prométhée enchaîné remuait dans Eschyle ; Rabelais porte un siècle ; et c’est la vérité Qu’en tout temps les penseurs couronnés de clarté, Les Shakspeares féconds et les vastes Homères, Tous les poëtes saints, semblables à des mères, Ont senti dans leurs flancs des hommes tressaillir, Tous, l’un le roi Priam et l’autre le roi Lear. Leur fruit croît sous leur front comme au sein de la femme. Ils vont rêver aux lieux déserts ; ils ont dans l’âme Un éternel azur qui rayonne et qui rit ; Ou bien ils sont troublés, et dans leur sombre esprit Ils entendent rouler des chars pleins de tonnerres. Ils marchent effarés, ces grands visionnaires. Ils ne savent plus rien, tant ils vont devant eux, Archiloque appuyé sur l’ïambe boiteux, Euripide écoutant Minos, Phèdre et l’inceste. Molière voit venir à lui le morne Alceste, Arnolphe avec Agnès, l’aube avec le hibou, Et la sagesse en pleurs avec le rire fou. Cervantes pâle et doux cause avec don Quichotte ; À l’oreille de Job Satan masqué chuchote ; Dante sonde l’abîme en sa pensée ouvert ; Horace voit danser les faunes à l’œil vert ; Et Marlow suit des yeux au fond des bois l’émeute Du noir sabbat fuyant dans l’ombre avec sa meute. Alors, de cette foule invisible entouré, Pour la création le poète est sacré. L’herbe est pour lui plus molle et la grotte plus douce ; Pan fait plus de silence en marchant sur la mousse ; La nature, voyant son grand enfant distrait, Veille sur lui ; s’il est un piége en la forêt, La ronce au coin du bois le tire par la manche Et dit : Ne va pas là ! Sous ses pieds la pervenche Tressaille ; dans le nid, dans le buisson mouvant, Dans la feuille, une voix, vague et mêlée au vent, Murmure : — C’est Shakspeare et Macbeth ! — C’est Molière Et don Juan ! — C’est Dante et Béatrix ! — Le lierre S’écarte, et les halliers, pareils à des griffons, Retirent leur épine, et les chênes profonds, Muets, laissent passer sous l’ombre de leurs dômes Ces grands esprits parlant avec ces grands fantômes. Liens vers les textes de cet auteur |
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La poésie, c'est les paroles éparses du réel (Octavio Paz)
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