L'eau qui parle - Georges Rodenbach
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L'eau qui parle - Georges Rodenbach
LE PARTI PRIS DES CHOSES LECONS DE CHOSES |
L'eau qui parle "La Jeunesse blanche" - 1886 Georges Rodenbach Dites, avez-vous remarqué, Vous les amants du Soir moroses, Quand vous allez, le long du quai, Pleurant l’exil des soleils roses, Quand vous allez par les temps gris, Vous les songeurs, les taciturnes, Ouvrir un peu vos yeux aigris À des paysages nocturnes, Quand, accoudés aux parapets, La bise, si peu qu’on la sente, Vous rend du rêve et de la paix Par sa douceur rafraîchissante, Avez-vous vu, quand sur les ponts Debout dans leur orgueil de pierre Vous entendez à petits bonds Chevaucher l’eau de la rivière, Dites, avez-vous remarqué Combien l’eau se plaint et frissonne Et demande aux parois du quai Pourquoi le granit l’emprisonne. C’est vrai qu’avec des soins pieux La nuit, comme au cou d’une amante, Met ses bijoux silencieux Sur cette eau qu’un regret tourmente, Les beaux bijoux des astres d’or, Mais ce luxe du ciel, qu’importe ! Et la rivière pleure encore Parce qu’un sort fatal l’emporte, Et qu’elle fuit à tout moment, Contrainte et brisée en des marches Promptes inexorablement, Malgré l’effort des grandes arches ! Et toute seule dans son lit L’eau semble amoureuse et s’étire Sous la lune qui l’appâlit, Et, comme une femme, elle attire. Mais elle veut de fiers amants ! Elle a des paroles mouillées Et chuchote, avec des serments, Qu’ils s’en iront sous les feuillées. Qu’ils s’en iront au bon soleil Chercher au fond de la campagne Un pacifique, un long sommeil Qu’un rêve de fleurs accompagne !… Et parfois des poètes doux Que la voix de l’eau triste appelle, Escaladent les garde-fous Pour aller dormir avec elle. Puisque personne n’a compris Combien leur Âme est grande et fière, Ils offriront leurs yeux flétris Aux baisers froids de la Rivière ! Autres textes du même auteur Amour vrai Amours inquiètes Au restaurant Aux mères qui battent leurs enfants Chanteuse d'oubli Charme du passé Collège ancien Fête de village L'horloge L'oubli La conscription La maison paternelle La Mer du Nord La mort de la jeunesse La nuit vient La passante La pluie Le cimetière Le coffret Les cailloux de Mousny Les cloches Les dimanches : tant de tristesse et tant de cloches Les enfants Les jardins Les jeunes filles Les lions Mysticisme Pour la gloire de Mallarmé Pour le tombeau de Verlaine Premier amour Premiers beaux vers Premières communiantes Ô neige, toi la belle endormeuse des bruits Processions Ses yeux Souvenirs d'enfance Tel soir fané, telle heure éphémère suscite |
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La poésie, c'est les paroles éparses du réel (Octavio Paz)
Gil Def- Admin
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