Limites - Jorge Luis Borges (1899-1986)
COUPS DE COEUR POETIQUES :: QUAND LA POESIE PASSE LES FRONTIERES :: POEMES DE LANGUE ETRANGERE - ESPAGNOL
Page 1 sur 1
Limites - Jorge Luis Borges (1899-1986)
Límites - Limites
Voz : Jose Luis Borges
"De estas calles que ahondan el poniente, una habrá (no sé cuál) que he recorrido ya por última vez, indiferente y sin adivinarlo, sometido a quien prefija omnipotentes normas y una secreta y rígida medida a las sombras, los sueños y las formas que destejen y tejen esta vida. Si para todo hay término y hay tasa y última vez y nunca más y olvido ¿Quién nos dirá de quién, en esta casa, sin saberlo, nos hemos despedido? Tras el cristal ya gris la noche cesa y del alto de libros que una trunca sombra dilata por la vaga mesa, alguno habrá que no leeremos nunca. Hay en el Sur más de un portón gastado con sus jarrones de mampostería y tunas, que a mi paso está vedado como si fuera una litografía. Para siempre cerraste alguna puerta y hay un espejo que te aguarda en vano; la encrucijada te parece abierta y la vigila, cuadrifronte, Jano*. Hay, entre todas tus memorias, una que se ha perdido irreparablemente; no te verán bajar a aquella fuente ni el blanco sol ni la amarilla luna. No volverá tu voz a lo que el persa dijo en su lengua de aves y de rosas, cuando al ocaso, ante la luz dispersa, quieras decir inolvidables cosas. ¿Y el incesante Ródano y el lago, todo ese ayer sobre el cual hoy me inclino? Tan perdido estará como Cartago que con fuego y con sal borró el latino*. Creo en el alba oír un atareado rumor de multitudes que se alejan; son lo que me ha querido y olvidado; espacio, tiempo y Borges ya me dejan." | "Parmi ces rues qui creusent l'ouest, il y en a une (je ne sais pas laquelle) que j'ai parcourue, pour la dernière fois, indifférent et sans le deviner, soumis à celui qui préfixe des règles omnipotentes et une mesure secrète et rigide aux ombres, aux rêves et aux formes qui tissent et retissent cette vie. Si pour tout il y a une fin et il y a un rythme et la dernière fois et le jamais plus et l'oubli Qui nous dira de qui, dans cette maison, sans le savoir, nous avons fait nos adieux ? Derrière la vitre désormais grise, la nuit cesse et de la hauteur des livres qu'une ombre tronquée s'étire sur la table vague, certains d'entre eux que nous ne lirons jamais. Il y a dans le sud plus d'une porte usée avec ses vases en maçonnerie et ses figues de barbarie, qu'à mon passage l'on barre comme s'il s'agissait d'une lithographie. Tu as toujours fermé une porte et il y a un miroir qui t'attend en vain ; et le carrefour te semble ouvert, et y veille, quadruple face. Janus Parmi tous vos souvenirs, il y en a un qui a été perdu irrémédiablement; On ne te verra pas descendre à cette fontaine Ni le soleil blanc, ni la lune jaune. Ta voix ne reviendra pas à ce que le Persan dans sa langue d'oiseaux et de roses, au coucher du soleil, devant la lumière diffuse, tu veux dire des choses inoubliables. Et le Rhône incessant et le lac, tout cet hier sur lequel je me penche aujourd'hui ? Aussi perdue que Carthage Qui, par le feu et le sel, a effacé le latin. Je crois qu'à l'aube, j'entends un grondement d'activité la rumeur des foules qui s'éloignent ; elles sont ce qui m'a aimé et oublié ; l'espace, le temps et Borges m'ont quitté Traduction : --- |
_________________
La poésie, c'est les paroles éparses du réel (Octavio Paz)
Gil Def- Admin
-
Nombre de messages : 6867
Age : 75
Localisation : Nord de la France
Date d'inscription : 16/11/2007
COUPS DE COEUR POETIQUES :: QUAND LA POESIE PASSE LES FRONTIERES :: POEMES DE LANGUE ETRANGERE - ESPAGNOL
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
|
|