Del pasado efímero - Antonio Machado (1875-1939)
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Del pasado efímero - Antonio Machado (1875-1939)
Del pasado efímero - Du passé éphémère
Voz : Antonio Oliver
Voz : Antonio Oliver
Este hombre del casino provinciano que vio a Carancha recibir un día, tiene mustia la tez, el pelo cano, ojos velados por melancolía; bajo el bigote gris, labios de hastío, y una triste expresión, que no es tristeza, sino algo más y menos: el vacío del mundo en la oquedad de su cabeza. Aún luce de corinto terciopelo chaqueta y pantalón abotinado, y un cordobés color de caramelo, pulido y torneado. Tres veces heredó; tres ha perdido al monte su caudal; dos ha enviudado. Sólo se anima ante el azar prohibido, sobre el verde tapete reclinado, o al evocar la tarde de un torero, la suerte de un tahúr, o si alguien cuenta la hazaña de un gallardo bandolero, o la proeza de un matón, sangrienta. Bosteza de política banales dicterios al gobierno reaccionario, y augura que vendrán los liberales, cual torna la cigüeña al campanario. Un poco labrador, del cielo aguarda y al cielo teme; alguna vez suspira, pensando en su olivar, y al cielo mira con ojo inquieto, si la lluvia tarda. Lo demás, taciturno, hipocondriaco, prisionero en la Arcadia del presente, le aburre; sólo el humo del tabaco simula algunas sombras en su frente. Este hombre no es de ayer ni es de mañana, sino de nunca; de la cepa hispana no es el fruto maduro ni podrido, es una fruta vana de aquella España que pasó y no ha sido, esa que hoy tiene la cabeza cana. "Campos de Castilla", 1912 | Cet homme du casino de province qui a vu Carancha recevoir un jour, son teint est blafard, ses cheveux gris, les yeux voilés de mélancolie ; sous sa moustache grise, des lèvres de lassitude, et une expression triste, qui n'est pas de la tristesse, mais quelque chose de plus et de moins : le vide du monde au creux de la tête. Il porte encore une veste de velours corinthien de velours et un pantalon boutonné, et un cordon de couleur caramel, poli et tourné. Trois fois il a hérité, trois fois il a perdu à la montagne sa richesse ; deux fois il est veuf. Il n'est animé que par le hasard interdit, sur le tapis de repos vert, ou à l'évocation d'un après-midi de torero, la fortune d'un joueur, ou si quelqu'un raconte l'exploit d'un valeureux bandit, ou les prouesses d'un voyou, sanglantes. Les banals bâillements politiques dicte au gouvernement réactionnaire, et prédit l'arrivée des libéraux, comme la cigogne revient au clocher. Petit paysan, il attend du ciel et craint le ciel ; parfois il soupire, en pensant à son oliveraie, et il regarde le ciel d'un œil inquiet, si la pluie tarde à venir. Le reste, taciturne, hypocondriaque, emprisonné dans l'Arcadie du présent, l'ennuie ; seule la fumée du tabac simule quelques ombres sur son front. Cet homme n'est pas d'hier, ni de demain, mais de jamais ; de souche hispanique il n'est ni un fruit mûr ni un fruit pourri, il est un fruit vain de cette Espagne qui a passé et qui n'a pas été, qui a aujourd'hui une tête de chameau. Traduction : --- |
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La poésie, c'est les paroles éparses du réel (Octavio Paz)
Gil Def- Admin
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