Himno entre ruinas - Octavio Paz (1914-1998)
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Himno entre ruinas - Octavio Paz (1914-1998)
Himno entre ruinas - Hymne entre les ruines
Voz : Claudia Sandoval
Coronado de sí el día extiende sus plumas. ¡Alto grito amarillo, caliente surtidor en el centro de un cielo imparcial y benéfico! Las apariencias son hermosas en esta su verdad momentánea. El mar trepa la costa, se afianza entre las peñas, araña deslumbrante; la herida cárdena del monte resplandece; un puñado de cabras en un rebaño de piedras; el sol pone su huevo de oro y se derrama sobre el mar. Todo es dios. ¡Estatua rota, columnas comidas por la luz, ruinas vivas en un mundo de muertos en vida! Cae la noche sobre Teotihuacán. En lo alio de la pirámide los muchachos fuman marihuana, suenan guitarras roncas. ¿Qué yerba, qué agua de vida ha de damos la vida, dónde desenterrar la palabra, la proporción que rige al himno y al discurso, al baile, a la ciudad y ala balanza? El canto mexicano estalla en un carajo, estrella de colores que se apaga, piedra que nos cierra las puertas del contacto. Sabe la tierra a tierra envejecida. Los ojos ven, las manos tocan. Bastan aquí unas cuantas cosas: tuna, espinoso planeta coral, higos encapuchados, uvas con gusto a resurrección, almejas, virginidades ariscas, sal, queso, vino, pan solar. Desde lo alto de su morenía una isleña me mira, esbelta catedral vestida de luz. Torres de sal, contra los pinos verdes de la orilla surgen las velas blancas de las barcas. La luz crea templos en el mar. Nueva York, Londres, Moscú. La sombra cubre al llano con su yedra fantasma, con su vacilante vegetación de escalofrío, su vello ralo, su tropel de ratas. A trechos tirita un sol anémico. Acodado en montes que ayer fueron ciudades, Polifemo bosteza. Abajo, entre los hoyos, se arrastra un rebaño de hombres. (Bípedos domésticos, su carne —a pesar de recientes interdicciones religiosas— es muy gustada por ¡as clases ricas. Hasta hace poco el vulgo los consideraba animales impuros.) Ver, tocar formas hermosas, diarias. Zumba la luz, dardos y alas. Huele a sangre la mancha de vino en el mantel. Como el coral sus ramas en el agua extiendo mis sentidos en la hora viva: el instante se cumple en una concordancia amarilla, ¡oh mediodía, espiga henchida de minutos, copa de eternidad! Mis pensamientos se bifurcan, serpean, se enredan, recomienzan, y al fin se inmovilizan, ríos que no desembocan, delta de sangre bajo un sol sin crepúsculo. ¿y todo ha deparar en este chapoteo de aguas muertas? ¡Día, redondo día, luminosa naranja de veinticuatro gajos, todos atravesados por una misma y amarilla dulzura! La inteligencia al fin encarna, se reconcilian las dos mitades enemigas y la conciencia-espejo se licúa, vuelve a ser rúente, manantial de fábulas: Hombre, árbol de imágenes, palabras que son flores que son frutos que son actos. "Libertad bajo palabra", 1960 | Couronné de lui-même le jour étend ses plumes. Cri jaune si haut levé, jet brûlant au centre du ciel, impartial et salutaire ! Les apparences sont belles dans leur vérité instantanée. La mer escalade la côte, prend appui entre les roches, éblouissante araignée; la blessure violacée du mont resplendit, une poignée de chèvres est un troupeau de pierres; le soleil pond son œuf d’or et se répand sur la mer. Tout est dieu. Statue brisée, colonnes mangées de lumière, ruines vives dans un monde de morts vivants ! La nuit tombe sur Teotihuacan. Au sommet de la pyramide, les jeunes gens fument de la marihuana, résonnent des guitares enrouées. Quelle herbe, quelle eau-de-vie nous donnent la vie ? Où pourrons-nous déterrer la parole, la proportion qui régit l’hymne et le discours, la danse, la ville et la balance ? Le chant mexicain éclate en jurons, étoile de couleurs qui s’éteint, pierre qui nous ferme les portes du toucher. La terre a saveur d'une terre vieillie. Les yeux voient, les mains touchent?, Ici peu de choses suffisent : une figue de Barbarie, épineuse planète de coralline, des figues encapuchonnées, de raisin au goût de résurrection, des clovisses, virginités farouches, de sel, du fromage, du vin, du pain solaire. Du haut de son teint hâlé une fille de l’île me regarde, svelte cathédrale vêtue de lumière. Tours de sel, contre les pins verts de la rive, les voiles blanches des barques surgissent. La lumière bâtit des temples sur la mer. New-York, Londres, Moscou, L’ombre couvre la plaine de son lierre fantôme, de sa vacillante végétations de frissons, de son duvet rare, de sa foule de rats. Ca et là grelotte un soleil anémique. Accoudé aux montagnes qui furent hier des villes, Polyphème bâille. En bas, entre les trous, se traîne un troupeau d’hommes. (Bipèdes domestiques, leur chair - en dépit de récents interdits religieux – est très appréciée par les classes nanties. Il n’y a peu encore le vulgaire les tenait pour des bêtes impures.) Voir, toucher des formes belles, quotidiennes. Dardante,ailée, bourdonne la lumière. Cette tache de vin a une odeur de sang. Comme le corail ses branches dans l’eau, j’étends mes sens dans l’heure vive : l’instant s’accomplit dans une jaune, harmonie, Ô midi, épi lourd de minutes, coupe d’éternité! Mes pensées bifurquent, serpentent, s’entrelacent, recommencent et s’immobilisent enfin, fleuves qui jamais ne débouchent, delta de sang sous un soleil sans crépuscule. Tout doit-il donc finir dans ce clapotis d’eaux mortes ? Jour, rondeur du jour, lumineuse orange aux vingt-quatre quartiers , tous traversés d’une même douceur jaune ! L’intelligence enfin s’incarne, les deux moitiés ennemies se réconcilient, et la conscience-miroir se liquéfie, redevient fontaine, source de fables : Homme, arbre d’images, paroles qui sont fleurs qui sont fruits qui sont actes. Traduction : Jean-Clarence Lambert, 1966 |
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La poésie, c'est les paroles éparses du réel (Octavio Paz)
Gil Def- Admin
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